COMMENT CHANGER SON RAPPORT AUX ÉMOTIONS ?
Depuis quelques dizaines d’années, la parole se libère autour des émotions. Autrefois, on disait que c’était une « affaire de bonnes femmes » ou même que cela concernait les personnes faibles. Aujourd’hui les émotions ont toute leur place et nous apprenons à mieux les écouter, ce qui est une très bonne chose. Cependant nous avons encore tendance à les répartir en deux catégories. Il y aurait d’abord les bonnes, celles qu’il faut rechercher et puis les mauvaises, à fuir. En vérité, aucune n’est mauvaise en soi et la question est plutôt de savoir comment mieux les gérer. Comment parvenir à contrôler nos émotions et aider aussi nos enfants à mieux les vivre ? Dans cet article, je vais vous montrer qu’il est possible de changer notre rapport aux émotions, notamment grâce à notre corps et à nos pensées.
Avant de continuer si vous préférez écouter le podcast de cet article ; par exemple en faisant vos tâches ménagères ou pendant un trajet en voiture, je vous invite à cliquer sur le lecteur ci-dessous :
Aucune émotion n’est mauvaise en soi
Avant toute chose, j’aimerais vous expliquer dans quel état émotionnel je me trouvais avant de vous parler de cette thématique des émotions. Je vous avoue que ça n’allait pas très fort. Je manquais de sommeil et ma fille de 3 ans et demi avait répandu des paillettes partout, on pouvait littéralement dire que la totalité de la maison étincelait, mais malheureusement pas de propreté ! Mon mari était encore une fois en déplacement, bref je n’étais pas au mieux de ma forme. Je me suis dit que cela pourrait peut-être servir d’exemple pour vous expliquer comment faire quand rien ne va.
Première chose importante à retenir : aucune émotion n’est mauvaise en soi. Je vous assure, aucune ! Pour nous en assurer, examinons-les une par une. Certains disent qu’il existe 5 émotions de base, d’autres 6, mais prenons pour exemple les 7 émotions de base établies par Paul Ekman.
La joie procure du bien-être
La joie est évidemment une émotion agréable, utile, précieuse, etc. Cette émotion nous procure évidemment du bien-être.
La surprise est parfois agréable
La surprise peut être positive quand il s’agit d’une fête d’anniversaire inattendue, d’un geste gentil auquel on ne s’attendait pas ou encore d’un cadeau que l’on découvre. Ce sont des expériences agréables.
La peur insuffle certaines fois du plaisir
A priori on se dit que c’est une émotion plutôt négative, on se sent mal quand on a peur. Mais reconsidérons cela en pensant aux montagnes russes. Elles nous font peur et pourtant beaucoup aiment ça, moi y compris. En montant, la tension augmente et en descendant on est tout simplement effrayé, tout en ressentant de la joie. Il en est de même pour les films d’horreur. Ça peut paraître bizarre à certains, mais on peut éprouver du plaisir en les regardant. La peur peut donc être positive !
Aimer le dégoût
Reprenons l’exemple des films d’horreur, ils font jaillir une autre émotion : le dégoût. Lorsqu’on y voit quelque chose de vraiment dégoûtant, on peut éprouver une forme de réjouissance. Si vos enfants n’ont jamais joué avec du slime, vous ratez quelque chose ! Ils aiment être dégoûtés de manipuler cette espèce de pâte collante. Les adultes ne le comprennent pas toujours, mais les enfants, oui !
La tristesse peut-elle être positive ?
Cela semble plus compliqué de tirer du positif de la tristesse. C’est un sentiment de perte ou de manque. Grâce à la tristesse, on peut prendre conscience de ce manque et c’est utile. Par ailleurs, vous avez peut-être déjà ressenti une autre forme de tristesse qui apparaît surtout à l’adolescence. Ce n’est pas un état dépressif, mais plutôt de la mélancolie dans laquelle on se complaît au fond. C’est un peu comme le spleen que décrivait Baudelaire à une époque où les auteurs se complaisaient dans cet état permanent. Ils recherchaient cette émotion et vivaient cela comme une expérience positive.

La colère est constructive
Vous savez sans doute que je suis catholique et dans la Bible, il y a un texte dans lequel Jésus éprouve une « sainte colère » lorsqu’il reproche aux marchands du Temple de faire du commerce dans la maison de Dieu. Il renverse tous leurs étals, il explose et c’est décrit comme une sainte colère. La colère est donc un sentiment de révolte vécu face à quelque chose d’injuste. Mais c’est aussi une source d’action, une force. C’est notamment ce qui a inspiré Martin Luther King face à l’injustice et à l’oppression.
La colère peut donc faire naître du positif et être constructive, à l’inverse de la violence, car ce n’est pas la même chose soyons clairs là-dessus. La colère nous pousse à faire changer les choses, à renverser le statu quo.
Le mépris donne l’occasion de se dépasser
On peut considérer le mépris comme un mélange de dégoût et de colère. Il peut nous permettre de nous dépasser et il est bon de mépriser ce qui est méprisable ! Dans une certaine mesure, il est aussi bon de mépriser l’argent. À ce propos, je vais vous raconter une histoire qui m’a marquée étant plus jeune. J’ai toujours admiré mon frère qui a 17 ans de plus que moi. Un jour, il a quitté son emploi, pourtant lucratif, car son patron voulait arnaquer une vieille dame. C’était quelque chose de légal mais cela aurait lésé la vieille dame et il aurait abusé de sa confiance. Mon frère a refusé et il a donc démissionné ce jour-là, au mépris de l’argent et du statut social que cet emploi lui apportait, car il privilégiait des valeurs plus élevées : l’honnêteté et l’intégrité. Allez-vous me dire que ce mépris était négatif ? Ce n’est pas mon avis.
Contrôler ses émotions grâce à notre corps
Toutes les émotions que nous venons de passer en revue peuvent apporter du positif. Elles peuvent apporter de la joie ou nous faire grandir et nous permettre de nous dépasser. En somme, aucune émotion n’est négative en soi, c’est simplement quelque chose que nous ressentons.
Après avoir compris cela, il faut prendre conscience du contrôle que nous pouvons exercer sur elles. Il existe une relation fascinante entre notre physiologie (notre corps) et nos émotions (notre esprit). Je vais tenter d’illustrer mon propos. Quand nous sommes détendus et calmes, nous respirons plus lentement et nos muscles sont relâchés. Mais quand nous faisons de la méditation ou des exercices de respiration, autrement dit, quand nous faisons l’effort volontaire de respirer plus lentement et de relâcher nos muscles, alors nous devenons plus calmes intérieurement.
D’un côté l’émotion de sérénité peut provoquer une réaction physiologique et inversement, une action physique volontaire visant à se relâcher peut aussi provoquer la réaction émotionnelle de calme. D’où le fameux conseil de respirer quand on est en colère, cela permet de modifier ses émotions.
De la même façon, quand nous sommes heureux nous sourions. Et à l’inverse, en souriant, nous ressentons de plus en plus de joie. C’est une autre forme de contrôle des émotions que j’ai expérimentée et que j’aime beaucoup. Le but n’est pas de faire semblant en permanence, mais quand on se sent mal et qu’on voudrait aller mieux, on peut sourire volontairement. Notre corps capte progressivement ce signal de joie et nous fait nous sentir mieux.
Pour faire simple, nous pouvons transformer et faire évoluer nos émotions grâce à notre corps.
Utiliser un outil de gestion des émotions
Le corps a un certain pouvoir sur les émotions, mais c’est aussi le cas pour nos pensées. Tout ce dont je vais parler va reposer sur un outil : l’échelle des émotions d’Abraham-Hicks. Hicks était une espèce de médium, elle entrait en contact avec une entité qu’elle appelait Abraham qui lui aurait « révélé » cette échelle des émotions. Autant vous le dire, je n’adhère pas du tout à ce côté New Age, alors oublions-le. Cependant, cet outil est utile de façon pratique.
Je l’ai déjà dit, il n’existe pas de mauvaise émotion en soi, simplement certaines sont plus agréables à vivre que d’autres. Il ne faut donc pas voir cette échelle d’émotions comme un classement de la moins bonne à la meilleure. Par exemple, certaines émotions jugées désagréables sont classées plus haut que d’autres perçues moins négativement.
Voyons à présent le tableau des émotions Abraham-Hicks :

Associé à mon site, mes podcasts et tout ce que je propose, j’ai créé une bibliothèque de ressources gratuites dans laquelle vous pourrez retrouver cette échelle d’Abraham-Hicks, ainsi que les autres outils que je vais décrire ici. Pour y accéder, il suffit de vous inscrire au Terrier des Montessouricettes et vous obtiendrez entre autres cet ensemble de documents gratuits ainsi que des extraits de mes formations.
Ce qui est intéressant avec cette échelle, c’est qu’on peut l’utiliser pour passer d’une émotion à l’autre. Si vous êtes dans le désespoir (émotion n° 22) et que l’on vous dit de vous réjouir et de vous sentir heureux, vous ne pourrez pas passer à l’émotion n° 1, la joie. En revanche, vous pourrez passer progressivement remonter dans le tableau, jusqu’à accéder à une émotion avec laquelle vous êtes plus à l’aise.
Par exemple, si vous êtes dans le désespoir et l’impuissance, vous pouvez remonter d’un cran et vous sentir dans l’indignité, l’insécurité et la culpabilité. Ça ne paraît pas tellement mieux. Sauf que, dans le désespoir et l’impuissance, vous êtes dans une situation déplaisante et vous ne pouvez rien y faire. Si vous remontez d’un cran, vous aurez de la culpabilité ou de l’indignité, mais ce sera parce que vous assumez une part de responsabilité dans ce qui arrive. Donc vous allez vous sentir un petit peu acteur de la situation, ce qui vous permet de progresser.
Mieux vivre ses émotions et les modifier grâce à sa pensée
Ne plus subir ses émotions
Je vais partir de mon cas personnel. Comme je vous le disais, ça n’allait pas du tout, mon mari était en déplacement sans que je n’y puisse rien, il y avait des paillettes partout dans la maison… C’est bien une situation où on peut se sentir impuissant et désespéré. Ça c’est mon émotion, mais à ce moment-là je peux aussi étudier mes pensées par rapport à la situation vécue.
À cet instant, ma pensée est « Tout cela m’arrive et je le subis. J’aurais dû ranger ce pot de paillettes. J’aurais dû faire plus attention, surveiller davantage ma fille ou bien ne pas épouser un militaire ! ». Cela me fait me sentir indigne, j’ai le sentiment d’être une mauvaise mère, mais au moins je ne suis plus impuissante. Le cran du dessus dans l’échelle des émotions Abraham-Hicks, c’est la jalousie.
En quoi est-ce mieux que la culpabilité et l’indignité ? Si je suis jaloux de quelqu’un, que je veux ce qu’il a, c’est que j’ai le sentiment de mériter la même chose que lui parce que j’en suis digne. Entre se sentir indigne ou coupable et être jalouse, on passe un cap dans l’estime de soi. “Pourquoi ces autres mamans y arrivent-elles sans souci ? Je voudrais tellement être à leur place !”
En remontant encore dans l’échelle, on peut avoir un sentiment de haine et de rage. On a un sentiment d’injustice, on se met en colère. Mais étant en colère, on sort du désespoir, car on a une force de vie et de changement. “Ce n’est pas juste, pourquoi est-ce que tout se passe bien pour elle et pas pour moi ?” On aboutit alors au découragement. C’est difficile, qu’on ne va pas y arriver… Si je continue à modifier ma pensée, j’arrive au blâme : “Pourquoi ai-je laissé Aliénor jouer toute seule pendant si longtemps ? Pourquoi est-ce que je n’arrive pas à donner un rythme de sommeil stable à mon bébé ?” Ensuite, on a du souci, puis du doute : « Comment faire, y a-t-il une autre solution ? ».
Mais tout cela est déjà plus léger que le sentiment de panique totale face à une maison dans le chaos. On peut remonter comme cela jusqu’à l’ennui, au sentiment de routine.
Changer son état d’esprit pour arriver au bonheur
Après l’ennui, on passe au contentement, on se satisfait finalement de ce qu’on a. On arrive à l’espoir. On se dit que les choses peuvent s’améliorer, ensuite on y croit vraiment, on est optimiste. Enfin on arrive à la confiance et au bonheur, on pense à tout ce qu’on va mettre en place pour que tout aille mieux.
À ce moment-là on va pouvoir faire preuve d’innovation : demander à la nounou ou la voisine de garder les enfants le temps de faire une sieste, demander à son mari de se promener avec les enfants pendant qu’on se repose. Et on se dirige progressivement vers le bonheur et l’amour.
Évidemment on ne va pas évoluer dans l’échelle des émotions en 30 secondes. Il va falloir du temps, peut-être une journée entière pour passer en revue une quinzaine d’émotions. En faisant ce travail et en vous décrivant tout ceci, ça va déjà mieux. Je suis partie d’une situation, de faits, au sujet desquels je ressentais des émotions, et des pensées me traversaient l’esprit. En changeant ses pensées, on voit bien que l’on change aussi ses émotions.
La prochaine fois que vous vous sentez mal, plutôt que de vous dire directement qu’il faut vous bouger les fesses pour être heureux, reprenez l’échelle des émotions. Essayez de modifier vos pensées pour changer progressivement vos émotions.
En somme, utilisez votre corps pour retrouver le bien-être et le calme, et utilisez votre pensée pour influer sur vos émotions.
Dépasser ses émotions et s’en servir de façon constructive
Les émotions sont une chose, mais nos actions en sont une autre. On peut aussi choisir d’ignorer certaines émotions. Vous savez que j’essaie toujours d’être dans la nuance, et ici aussi, il y a un équilibre à trouver.
Autrefois, on enfouissait les sentiments et les traumatismes au fond de soi. On essayait de ne plus ressentir ses émotions. On faisait aussi porter le poids de ses secrets et de ses traumatismes aux générations suivantes. Sans savoir pourquoi, elles sentaient que quelque chose n’allait pas dans l’histoire de la famille. Agir ainsi est très mauvais, car cela finit toujours par ressurgir de façon terrible.
Aujourd’hui, on est passé dans l’excès inverse, car on trouve beaucoup de gens qui passent leur temps à se regarder le nombril. J’espère ne pas vous heurter, mais quand une psychothérapie n’en finit pas et tourne toujours autour du même sujet, c’est souvent que l’on ressasse ses émotions. Plutôt que d’essayer de les dépasser ou de les sublimer, on ressasse encore et encore ses émotions à propos d’un même fait.

Attention, je ne parle pas de traumatismes absolument tragiques qui prennent nécessairement plus de temps (je pense à une maman que je connais qui a vécu de véritables actes de torture pendant toute son enfance et sa jeunesse).
Par ailleurs, je généralise peut-être, mais beaucoup de grandes œuvres d’art sont le résultat d’émotions très fortes. Ces dernières n’étaient pas forcément agréables, mais elles ont été transcendées et sublimées (d’un point de vue psychanalytique). Au lieu de se contenter de vivre dans cette émotion, on dépasse ses émotions et on s’en sert pour construire quelque chose.
Si vous vous retrouvez dans cette situation, à ressasser vos émotions, ce que j’écris ne va pas vous faire plaisir, mais cela peut être constructif : parfois, on se contente de notre position de victime. On se dit que c’est normal, que ce n’est pas notre faute. Mais parfois on a besoin d’un coup de pied aux fesses pour se sortir de ce positionnement, alors le voici : vous pouvez dépasser vos émotions et les utiliser pour construire quelque chose.
Aider les enfants à gérer leurs émotions
Tout ce que vous avez lu jusqu’ici concernait les adultes, mais abordons à présent la question des enfants et des adolescents. Comment pouvons-nous aider nos enfants à mieux gérer leurs émotions et à vivre pleinement avec ?
Selon moi, le 1er point est de développer le vocabulaire des émotions. Souvent, les enfants ne parviennent à en nommer que 4 ou 5 : la joie, la colère, la tristesse et la peur. Cependant l’angoisse, être terrifié, c’est différent de la peur. Assez fréquemment, les enfants ont du mal à être ainsi nuancés dans ce qu’ils éprouvent. Ils maîtrisent mal tout cela.
Dans le Terrier des Montessouricettes évoqué plus haut, je mets à votre disposition une roue des émotions de Plutchik à construire en forme de circomplexe, qui est une sorte de cône arrondi. Vous verrez une photo de la roue construite si vous vous inscrivez. C’est une roue des émotions détaillée avec des degrés pour chacune. Pour le chagrin par exemple, il y a des degrés moindres comme la tristesse et la songerie, plus légers.

Cette roue comporte 8 émotions de base, qui vont de l’état le plus fort, à leurs degrés les plus légers. Peu importe finalement le nombre d’émotions indiquées, le but est d’améliorer la finesse de la perception et du vocabulaire.
Pour y parvenir, je vous propose une autre roue plus détaillée. Cela donne l’occasion de choisir une émotion de base, puis d’aller progressivement dans les nuances de celle-ci.

Tout cela peut aider votre enfant à approfondir son vocabulaire. Une fois que les émotions et leurs degrés sont connus, on peut aborder les mélanges d’émotions. Voici justement un tableau pour aider votre enfant à déterminer de quels mélanges sont issues certaines émotions :

Ce tableau peut être un point de départ pour discuter avec ses enfants : « Qu’est-ce que la fierté ? On éprouve de la joie, mais pas seulement, etc. ». Ça ouvre le débat et ça permet de parler des émotions.
Au fur et à mesure que vos enfants grandissent, je vous invite à les amener à utiliser ces outils eux aussi pour leur permettre de modifier leurs émotions.
Libérer la parole autour des émotions
Ce sujet des émotions est très vaste et j’espère que cet article vous aura été utile. N’hésitez pas à le partager autour de vous ou sur les réseaux sociaux. Vous avez peut-être aussi l’envie d’être accompagné dans votre parentalité et d’avoir l’occasion d’aborder les soucis et questionnements du quotidien plus en profondeur. Si vous cherchez d’autres parents pour libérer la parole ou si vous voulez tout simplement obtenir des ressources supplémentaires pour l’éducation de votre enfant, je vous invite à découvrir notre accompagnement à la parentalité et à l’IEF Montessori. Que vous pratiquiez Montessori à la maison ou non, c’est ouvert à tous les parents qui souhaitent éduquer leurs enfants dans le respect et la bienveillance.
Et n’oubliez pas de rejoindre le Terrier des Montessouricettes pour récupérer toutes les ressources mentionnées dans cet article !

Site très intéressant, merci beaucoup