Le coschooling, qu’est-ce que c’est ?
Après les termes de homeschooling et d’unschooling, vous avez peut-être entendu parler de ce nouveau venu : le coschooling (littéralement « enseignement avec », sous-entendu avec l’école). Si le mot est nouveau, le phénomène ne l’est pas : il s’agit tout simplement d’apprendre des choses à ses enfants en parallèle de l’école.
Les parents font donc « travailler » (nous verrons que ce terme est en fait très large) les enfants le soir, le mercredi ou le week-end pour leur faire découvrir des choses qui relèvent généralement de l’école.
Si beaucoup de parents le font depuis toujours, je pense que ce n’est pas un hasard si ce nom a commencé à émerger il y a environ un an : si l’on a eu besoin de nommer le phénomène, c’est qu’il prend de l’ampleur, nourri par une méfiance de plus en plus grande vis-à-vis de l’école.
Pourquoi le coschooling
Le coschooling repose sur un principe très simple : les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Ils sont responsables de l’éducation que reçoivent leurs enfants et de par leur grande proximité avec eux, ils ont un rôle majeur à jouer en la matière.
C’est d’ailleurs tout à fait naturel : il se forme dès la naissance un lien d’attachement très puissant entre parents et enfants, lien biologique qui pousse les parents à prendre soin de leur descendance et à vouloir ce qu’il y a de mieux pour elle. Même si ce lien physique, chimique et psychologique a dans de rares cas des difficultés à se former (certaines mères par exemple ne ressentent pas du tout d’amour maternel juste après la naissance, mais parfois le lien finit tout de même par se former si on accepte de laisser le temps agir), la société en a fait un principe de base de la parentalité.
C’est ainsi que l’on retrouve dans cet article du Code civil qui est lu à tous les mariages : « Les époux assurent ensemble la
direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir.«
Si l’on ne ressent pas d’instinct qui pousse à éduquer et instruire ses enfants, il faut donc au moins le faire par devoir, de même qu’il est évident qu’un parent doit faire en sorte de nourrir son enfant correctement.
Les parents sont donc responsables de l’éducation (et de l’instruction, même si ces mots ne sont pas équivalents) mais ils peuvent choisir de déléguer ou non cette responsabilité, tout comme ils peuvent le faire pour la nourriture.
Car s’il faut nourrir ses enfants, il y a bien des façons de le faire. Certaines mamans achètent leur pain à la boulangerie, d’autres le font elles-mêmes. Certaines achètent leurs fruits et légumes au marché ou en grande surface, d’autres les font pousser dans leur jardin.
Dans le premier cas, suivant l’évolution naturelle de la société, on délègue les tâches aux personnes les plus compétentes pour le faire, des personnes formées pour, spécialisées dans ce domaine. Au tout début de notre histoire, chaque famille était auto-suffisante et pouvait chasser, préparer à manger, se fabriquer des vêtements avec des peaux de bête. Petit à petit, avec l’apparition des villages, certains se sont perfectionnés dans des domaines précis et les autres ont pris l’habitude d’aller les voir pour se faire faire des vêtements, pour obtenir des poteries ou des armes. Cette apparition des métiers est un phénomène logique et naturel, car personne ne peut savoir tout faire, surtout aujourd’hui où les connaissances et les savoir-faire sont si nombreux.
Mais pour autant, certains préfèrent assumer pleinement leurs responsabilités dans certains domaines, ou bien parce qu’ils les considèrent comme trop importants pour être délégués à des étrangers, ou bien parce qu’ils n’ont personne autour d’eux d’assez compétent pour accomplir cette tâche correctement, ou bien encore parce que leur famille a des besoins spécifiques auxquels le « spécialiste », l’homme de métier, ne peut répondre.
Dans l’exemple de la nourriture, si certaines familles font le choix de produire elles-mêmes leur fruits et légumes, c’est souvent parce qu’elles considèrent que l’alimentation est fondamentale pour être en bonne santé et qu’elles se méfient des pesticides utilisés par de nombreuses exploitations.
Si certains font leur pain eux-mêmes, cela peut être parce qu’ils n’ont pas de boulangerie qui fasse du bon pain à côté de chez eux ou parce que certains membres de leur famille peuvent souffrir d’une intolérance au gluten et qu’ils doivent donc faire du pain à la farine de châtaigne ou autre, ce que ne propose pas leur boulanger
Pour l’éducation, c’est exactement la même chose et trois cas se présentent donc :
- les parents délèguent intégralement l’instruction de leurs enfants à une école (publique ou privée, peu importe ici)
- les parents assument eux-mêmes leur responsabilité d’éducateurs et choisissent l’instruction en famille (IEF), souvent appelée « école à la maison »
- les parents envoient leurs enfants à l’école mais supervisent de près ce qu’ils apprennent et contribuent aussi de leur côté aux apprentissages de leurs enfants : c’est le coschooling.
Il est donc naturel que plus on entende parler des mauvais résultats de l’école en France (études PISA, récents tests à l’école primaire, comparaisons avec les autres pays du monde…), plus les parents souhaitent reprendre la main sur cet aspect majeur de leur parentalité : l’éducation.
L’IEF se développe donc de plus en plus (on est passés d’un peu moins de 3000 enfants instruits en famille sans cours par correspondance en 2007 à plus de 7400 en 2015, comme le note l’association LAIA, qui regroupe des familles pratiquant l’IEF), mais beaucoup de familles ne peuvent pas recourir à ce choix pour des raisons le plus souvent financières, car pour pratiquer l’IEF il faut ou bien qu’un des parents ne travaille pas ou que les parents puissent adapter suffisamment leur planning de travail.
Le coschooling est alors la solution idéale car il s’agit de faire globalement confiance à une école bien choisie, tout en apportant à l’enfant tout ce dont il pourrait avoir besoin en plus.
Ce qu’est le coschooling
Le coschooling peut prendre bien des formes et peut être plus ou moins structuré. Certains parents reprennent avec leurs enfants les notions apprises en classe mais en leur apportant un autre éclairage : par exemple mieux comprendre le principe de la retenue dans les additions grâce aux perles dorées Montessori, ou faire des petits jeux pour faciliter l’apprentissage des dates en histoire (par exemple Chroni ou Timeline que nous aimons beaucoup à la maison ; ce sont des liens affiliés, ce qui signifie que nous touchons un tout petit pourcentage sur chaque achat, sans coût supplémentaire pour vous).
D’autres décident de ne pas se préoccuper du programme suivi en classe (sauf pour les devoirs bien sûr) et de proposer à leurs enfants des choses qui n’ont rien à voir : aller visiter un musée, se passionner pour les pingouins, apprendre à reconnaître les fleurs sauvages…
L’avantage de cette deuxième solution, c’est que l’on est sûr de ne pas rentrer en concurrence avec l’école et de ne pas mélanger les méthodes.
Dans certaines familles, il y a des temps de travail prévus et réguliers, par exemple avant de partir à l’école pour les lève-tôt, le soir après l’école, le mercredi ou le week-end.
Dans d’autres, c’est l’occasion qui fait le larron et on saisit les occasions d’apprentissage comme elles viennent.
Quoi qu’il en soit, ce qui caractérise le coschooling c’est l’intentionnalité qu’y mettent les parents : ils font un effort particulier, délibéré, pour apprendre des choses à leurs enfants, ou bien en cherchant dans leur vie quotidienne ce qui peut être prétexte à une nouvelle découverte, ou bien en préparant et en provoquant les situations d’apprentissage.
Pour certains parents, il s’agit d’une simple coopération entre l’école et la famille, pour d’autres il s’agit d’une porte d’entrée vers l’instruction en famille (IEF), d’un test : ils peuvent expérimenter tranquillement, voir ce qui convient le mieux à leur enfant, avant d’envisager de sauter le pas et de le déscolariser complètement.
D’autres au contraire ont déjà pratiqué l’IEF mais ont préféré rescolariser leur enfant pour toutes sortes de raisons (souvent parce que l’enfant le désire ou pour des raisons financières, souvent car le parent qui était le principal éducateur doit reprendre le travail) et c’est alors pour eux le moyen de garder un certain contrôle sur l’éducation et l’éveil de leur enfant, sans porter l’entière responsabilité de son instruction.
On retrouve d’ailleurs chez les partisans du coschooling la même diversité que chez les familles qui pratiquent l’instruction en famille : certains préfèrent le travail formel, d’autres les apprentissages informels, certains se rapprochent de la pédagogie Montessori, d’autres de Steiner, Reggio etc. et d’autres encore mélangent allègrement ce qui leur plaît.
Ce que ce n’est pas
Mais attention à une confusion encore fréquente : le coschooling n’est pas pour autant du homeschooling à temps partiel !
Certains imaginent que dans les familles qui pratiquent le coschooling, les enfants ne vont à l’école que quelques jours dans la semaine, et restent à la maison le reste du temps, ce qui n’est généralement pas le cas.
Certes, chez les tout-petits en maternelle, on peut parfois obtenir de n’emmener les enfants à l’école que le matin et de les garder à la maison l’après-midi, ce qui arrange d’ailleurs souvent les enseignants qui n’ont pas la place pour tous leurs élèves dans les dortoirs.
Mais en-dehors de cette situation qui n’est d’ailleurs que tolérée et qui devrait disparaître complètement si l’âge de l’obligation d’instruction est rabaissé à 3 ans au lieu de 6, il y a l’obligation d’assiduité scolaire… Ce qui signifie qu’à partir du moment où l’on inscrit son enfant à l’école, on s’engage à l’y emmener tous les jours et à lui faire respecter les horaires scolaires, sauf exceptions médicales ou majeures.
L’Education nationale est d’ailleurs de plus en plus attentive aux cas d’absentéisme et les conséquences d’un trop grand nombre d’absences non justifiées peuvent être graves : rappel à l’ordre, envoi d’une « information préoccupante » aux services sociaux, enquête sociale etc. Ne jouez donc pas avec le feu !
Mais est-ce qu’on ne peut pas les laisser tranquilles, ces enfants qui passent déjà leurs journées à l’école ?
J’entends déjà certains parents affolés, qui imaginent ces petits de parfois 3 ou 4 ans, harassés par une longue journée d’école, s’installer sur une table une fois rentrés chez eux pour enchaîner avec de longues heures d’étude avec leurs parents…
« Mais est-ce qu’on ne pourrait pas leur ficher la paix, aux enfants ? Est-ce qu’ils ne passent pas déjà suffisamment de temps à l’école ? »
Bien sûr, il existe et il existera toujours des parents excessifs, de ceux qui préparent dès la maternelle l’entrée en classes prépa de leur rejeton, de ceux qui suivent les méthodes pratiquées en Corée du Sud ou à Singapour, à coup de cours particuliers, de baby yoga en anglais, ou de bachotage rigoureux. En oubliant que les taux de suicide chez les jeunes de ces pays sont parmi les plus élevés au monde…
Mais surcharger les enfants est généralement la dernière chose que souhaitent les parents, qui sont très attentifs au bien-être de leurs enfants. Pour la plupart, le coschooling passe avant tout par la curiosité et le plaisir d’apprendre.
Plutôt que d’accumuler les heures de travail, il s’agit le plus souvent de faire les devoirs de façon plus ludique, de prévoir de petites séances de travail courtes et plaisantes ou des séances un peu plus longues et approfondies, sur des thèmes qui intéressent l’enfant, le mercredi ou le weekend.
Par ailleurs, tout dépend de ce que l’on appelle « travail ». C’est un terme que je n’hésite pas à utiliser pour toutes sortes de choses, fidèle en cela à la pédagogie Montessori pour laquelle le travail ne doit pas nécessairement être quelque chose de pénible et de désagréable.
Je considère qu’un bébé qui s’entraîne à ramper ou qui s’efforce de se mettre debout en s’appuyant sur un meuble « travaille » sa motricité. Qu’un bambin qui pointe un objet du doigt et essaie d’en répéter le nom « travaille » son langage. Qu’un petit enfant qui s’entraîner à verser de l’eau dans un verre travaille, tout comme un enfant qui pèse les quantités pour une recette de cuisine.
Une grande partie de la pédagogie Montessori est consacrée à la Vie pratique, c’est-à-dire aux activités qui permettent à l’enfant de développer son autonomie dans la vie quotidienne (s’habiller seul, se servir à boire, à manger, prendre soin de lui-même ou de son environnement etc.).
Dès qu’un enfant marche, il gagne en autonomie et peut tourner ses efforts vers d’autres plans : cela répond même à un besoin profond chez lui, à une véritable période sensible.
Et vous l’avez sûrement remarqué, lorsqu’un enfant fait quelque chose qui l’attire vraiment, cela ne lui demande presque aucun effort !
Sans compter qu’entre un temps de travail où l’enfant est libre de se déplacer, de bouger, de changer d’activité quand il le souhaite, et un temps d’école où il faut rester assis à sa table sans bavarder, il y a un véritable monde !
Bref, bien sûr qu’il peut y avoir des dérives et que certains parents pousseront toujours les bonnes choses à l’excès, mais on peut tout à fait proposer à un enfant des temps d’apprentissage en plus de l’école sans pour autant l’épuiser, bien au contraire, en particulier si l’on se tourne vers une pédagogie active comme la pédagogie Montessori.
L’essentiel est de bien observer son enfant, ses centres d’intérêt, ses besoins profonds, et bien sûr aussi ses signaux de fatigue. Sans oublier que parfois, le meilleur remède à la surexcitation qui suit souvent le retour de l’école est une activité qui nécessite du calme et de la concentration.
Si l’on observe bien les enfants et que l’on prend le temps de répondre à leurs besoins et à leurs centres d’intérêt individuellement (ce que ne permet pas l’école avec ses classes souvent surchargées), on peut en même temps remplir le réservoir affectif de nos bouts de chou qui est souvent bien vide après une journée passée en collectivité.
Bref, je pense qu’il faut plutôt voir le coschooling comme une occasion pour l’enfant de se ressourcer que comme une source d’épuisement.
Beaucoup de mes stagiaires ont d’ailleurs choisi cette voie, en particulier pour leurs enfants qui sont en maternelle et dont les horaires sont encore relativement légers.
La pédagogie Montessori leur offre une plus grande liberté que les manuels scolaires, même si elle est relativement difficile à appliquer si l’on se contente de lire des livres sans suivre de formation.
Il s’agit en effet d’une pédagogie qui repose entre autres sur l’attitude de l’éducateur, ce qui se transmet difficilement à l’écrit. Mais aujourd’hui, grâce aux vidéos sur Internet, il est possible de proposer des formations en ligne que l’on peut suivre directement de chez soi, comme celles des Montessouricettes.
Comme mes formations sont spécialement conçues pour les parents qui veulent appliquer la pédagogie Montessori chez eux, elles sont idéales pour pratiquer le coschooling, même si l’on n’a pas beaucoup d’espace ou de budget.
Si cela vous intéresse, je vous invite donc à consulter les pages de mes formations à la Vie pratique, à la Vie sensorielle et au langage !
Et vous, pratiquez-vous déjà le coschooling, sous une forme ou sous une autre ?